Oui c’est une sorte de signal, un truc d’animal pour se dire qu’on ne se veut pas de mal ou quelque chose comme ça... quand votre petit chien remue la queue ou se roule sur le dos en position soumise, il vous dit bonjour.
J’en veux pour preuve que dans l’anonymat sécurisant de la rue, les gens oublient leur petit toc, et on échappe heureusement au bourdonnement intempestif de petits insectes craintifs se souhaitant à toute heure une bonne journée. Pas besoin de se reconnaître et de se le dire, "ça coule de source"
Par contre dans la nature, dans l’immense vide inquiétant de la nature, là impossible d’y couper. C’est une sorte de respiration vitale. Quiconque ne s’y soumettrait pas exprimerait déjà le danger
Même si vous êtes en train de discuter main dans la main avec votre amie, tout deux marchant, vous-même très inspiré par l’air vivace et pur et lui contant "le chêne et le rocher", vous le savez, il vous faudra couper vos phrases d’un bonjour synthétique à chaque croisement avec un inconnu. Ou si vous mordez dans un sandwich, tout près d’un lac, pareil : plutôt recracher la bouchée en mâche que de ne pas répondre au piaulement du joggeur passant tout près, de peur de vous signaler comme étant d’une autre espèce, invasive et peut-être hostile...Si vous avez tardé, ou qu’il ne vous a pas entendu, criez, courez s’il le faut, pauvre de vous rattrapez-le, assurez-vous que tout est bien réparé.
Et si vous êtes à vélo, en pleine côte, visage rouge au bord de l’asphyxie, ça n’y fait rien, ça ne compte pas, c’est secondaire : ils vous diront "bonjour", et attendront que vous en articuliez autant.
sous-entendu : "on est humain, on se reconnaît" et c’est tout ce qui compte, quand on est isolé dans l’énorme maelstrom naturel. Imaginez que ce cycliste soit en fait un orthoptère géant, avec ses cuisses plus grosses que son buste, son exosquelette, ses lunettes en oeil de mouche, ça vaut quand même le coup de vérifier...Et s’il n’a pas répondu, trop occupé à suffoquer, le doute sera toujours permis.